Depuis longtemps, les juges, pour sanctionner la diffusion d’image représentant des biens, se fondent sur l’article 544 du Code civil qui prévoit que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements ».
Les juges considèrent que l’image d’un bien fait partie du bien et son exploitation relève du fructus.
La Cour de Cassation a été plus loin, en consacrant une jurisprudence naissante, qui élargissait le périmètre du droit à l’image : elle a ainsi jugé, dans un arrêt du 10 mars 1999 devenu célèbre (« l’arrêt Gondrée »), que l’exploitation du bien sous forme de photographies portait atteinte au droit de jouissance du propriétaire.
Une société avait en effet photographié un immeuble classé monument historique à usage de café afin de reproduire les photographies sous forme de cartes postales vendues dans le commerce. Si les juges du fond ont rejeté la demande du propriétaire de l’immeuble, la Haute Juridiction consacre en revanche le droit pour un propriétaire de s’opposer à la diffusion de l’image d’un bien lui appartenant, alors même que la photographie a été réalisée à partir d’un domaine public.
En conséquence, si la photographie a été publiée sans l’autorisation du propriétaire du bien et que la diffusion nuit d’une manière ou d’une autre à cette personne, elle sera à même d’agir en justice pour obtenir des dommages et intérêts. La preuve de ce préjudice sera rapportée si le propriétaire du bien arrive à démontrer que la publication l’a privé du produit de l’exploitation de l’image du bien photographié.
La Cour de Cassation, dans un arrêt de cassation du 2 mai 2001, a posé une nouvelle exigence, en précisant qu’il appartient aux juges du fond de : « préciser en quoi l’exploitation de la photographie par les titulaires du droit incorporel de son auteur portait un trouble certain au droit d’usage ou de jouissance du propriétaire ».
En tout état de cause, il convient donc d’observer qu’en pratique, les juges, d’une façon constante, ont sanctionné l’atteinte dans les seuls cas d’utilisation commerciale qui revenait à priver le propriétaire du bénéfice qu’il aurait pu tirer de l’exploitation de son bien.
Le critère temporel n’est pas sans conséquence sur les droits du propriétaire. En effet, les juges estiment que lorsque la photographie litigieuse a été prise à une date où le demandeur n’était pas propriétaire, « les accords que le précédent propriétaire a pu conclure avec des tiers pour exploiter l’image ne peuvent par conséquent être remis en cause par le nouveau propriétaire qui doit se les voir régulièrement opposer » (CA Paris, 14/10/98).
Pour conclure, dès lors qu’un bien est le sujet principal, parfaitement identifiable, d’une image, que cette image est exploitée commercialement directement ou indirectement, les juges caractérisent presque automatiquement le trouble du propriétaire. La mise en œuvre du droit à l’image permet ensuite d’indemniser le propriétaire.