Au musée archéologique d'Iran à Téhéran : Des poteries et objets en stéatite et en chlorite, originaire du berceau de l’humanité

[Hervé C]

 

C’est au musée archéologique national d'Iran, situé dans la capitale de ce beau pays, Téhéran, que je vous propose d’aller faire un tour. Il conserve depuis 1937 des objets de la vie quotidienne datant des époques Paléolithiques, Néolithiques, de l'âge du bronze et de celui du fer des antiquités mèdes, achéménides, séleucides, parthes et sassanides.  

Je ne vais pas vous faire visiter l’ensemble du musée, sauf si vous me demander à voir d’autres pièces que celles présentées, mais vais simplement vous montrer des pièces qui m’ont interpellées, fabriquées par des artistes de la Culture Jiroft, qui datent de l’âge du bronze ancien, soit -2200 à -1 600 ans, avant notre ère.

C’est en 2001, dans la vallée de la rivière Halil, à environ 40 km au sud de Jiroft, petite ville du Sud-Est de l'Iran, non loin du golfe Persique, que grâce à une inondation, ont été exposées à l’air libre, les ruines d'une ancienne nécropole, construite par ce peuple de l'âge du Bronze qui avait prospéré en limite de frontière de la Mésopotamie.

A la suite de cet épisode météorologique, une vague d'objets archéologiques remarquables, a inondé le marché des antiquités, notamment en Angleterre et aux USA : Pièces de joailleries, armes, céramiques, récipients en pierre, jeux de société, le tout témoignant du grand talent artistique de ce peuple, avec de somptueuses incrustations de cornaline ou de lapis-lazuli.

Au début, les spécialistes ont considéré ces objets, signalés sans plus de précision, comme des « œuvres venues d’Asie Centrale », comme celles de talentueux faussaires, mais avec l'arrivée d'autres artefacts sur le marché des antiquités les mois suivants, ils ont compris qu’ils pouvaient être authentiques, mais provenant d'un site non répertorié dont ils n'avaient pas connaissance.

Une enquête de la police iranienne a conduit à l'arrestation de plusieurs trafiquants et à la saisie de nombreuses antiquités. Le site a été placé sous protection, les pillards qui tentaient d’y mettre les pieds le faisant au péril de leur vie.

Les fouilles ont débuté en février 2003 et se sont poursuivies sur plusieurs saisons. Les archéologues ont identifié une nécropole principale qu'ils ont baptisée « Mahtoutabad ». La majorité des découvertes initiales et des premiers artefacts proviendrait de ce site malgré un pillage des objets funéraires antérieur aux fouilles. Les archéologues ont également fouillé deux tumuli distants entre eux d'environ deux kilomètres l'un de l'autre s'élevant au-dessus de la plaine à moins de deux kilomètres à l'Ouest de la nécropole. 

Les deux tumuli « Konar Sandal Sud » et « Konar Sandal Nord », ont montré qu'ils dissimulaient les vestiges de deux complexes architecturaux majeurs. Sous le tumulus Nord a été dégagé un lieu de culte. Le tumulus Sud s’avérait être les restes d'une citadelle fortifiée.

Au pied des tumulus, enterrés sous plusieurs mètres de sédiments, les archéologues ont découvert les vestiges de plus petits bâtiments. Les archéologues estiment que les deux tumuli faisaient autrefois partie d’une ville qui s'étendait sur plusieurs kilomètres à travers le plateau.

Les saisons de fouilles se sont succédées, avec une première phase d'excavations du site qui a duré jusqu'en 2007. De nombreux spécialistes du monde entier sont venus sur ce site archéologique désormais considéré comme majeur.

Les archéologues ont trouvé différents types d'objets, certains pratiques, d'autres décoratifs ou sacrés, souvent incrustés de pierres semi-précieuses parmi lesquelles calcite, chlorite, obsidienne et lapis-lazuli. Les habitants de cette cité semblent avoir entretenu un contact étroit avec la Mésopotamie, notamment la région située entre le Tigre et l'Euphrate qui coïncide à peu près avec l'actuel Irak.

Les fouilles du tumulus Sud, ont révélé que la citadelle qui y était enfouie, était constituée de murs en brique monumentaux que la datation au radiocarbone situe entre -2500 et -2200 avant notre ère.

Une deuxième campagne de fouille a été lancée en 2014, où de nombreux chercheurs étrangers, dont des français, ont prêté main forte. Depuis d’autres découvertes majeures ont été faites. Un excellent article du National Geographic peut être consulté à l’adresse suivante, pour les personnes intéressées : https://www.nationalgeographic.fr/histoire-civilisations/la-culture-de-jiroft-mysterieuse-civilisation-de-lage-du-bronze.

Ces découvertes ont confirmé que la civilisation de Jiroft remontait à 7000 ans, ce qui fait d’elle une civilisation encore plus ancienne que la civilisation mésopotamienne. Elle est désormais connue comme la plus ancienne civilisation de l’Orient, qui vivait dans la plaine fertile de la rivière Halil-Rud.

Des fouilles récentes ont permis la découverte de tablettes d’argile avec des inscriptions en écriture géométrique, qui n’ont pas encore été déchiffrées. Elles semblent prouver que les habitants de Jiroft pourraient être les inventeurs de l’écriture, et non pas, comme nous l’avons appris à l’école, les Sumériens.

Il est temps que je vous présente les objets et récipients en pierre que j’ai photographié dans ce musée, des pièces en stéatite et en chlorite sculptée avec une élégance particulière, dont certaines conservent des incrustations qui sont soit en pierre de couleur, soit en nacre. Sur ces pièces, sont représentés des humains, des divinités, des animaux, des palmiers, des serpents et des scorpions, la plupart avec des yeux incrustés.

 

DSC_9451 Tablette d'argile à l'écriture cunéiforme, -3100/ -2800 avant notre ère

DSC_9453 et 9454 Vaisselle en stéatite/chlorite, Age de bronze III, - 2600/ -2400 avant notre ère

DSC 9455 Le site de Jiroft regorgeait d'objets en forme de cadenas comme celui-ci. Parfois simplement appelés « poids », leur fonction reste incertaine à ce jour. Objet en stéatite/chlorite 

DSC 9457 et 9458 Vaisselle en stéatite/chlorite avec incrustations, Age de bronze III, - 2600/ -2400 avant notre ère

DSC 9459 Figurine représentant ce qui semble être un zébus, Age de bronze III, - 2600/ -2400 avant notre ère

DSC_9460 à 9472 Vaisselle en stéatite/chlorite, Age de bronze III, - 2600/ -2400 avant notre ère. La coupe montre le travail de tournage, absolument étonnant