Bonjour,
géologue, étudiant en Belgique à l'époque, j'ai effectué mon premier stage pratique en levé de galerie en mine à Enguiales en 1969. J'étais encadré par Arnold Bonne de l'Université de Louvain qui a effectué une thèse en minéralogie sur ce gisement.
A l'époque, la mine appartenant à la Société Minière et Métallurgique du Chatelet fonctionnait avec une quarantaine d'ouvriers, en majorité marocains qui avaient été recrutés à l'ancienne mine de Oujda.
L'abattage se faisait au marteau piqueur et tirs après jumbo de foration en suivant les filons. Le gisement comportait des filons mâles (perpendiculaires à la schistosité des micaschistes ) et des filons femelles (parallèles). Les filons mâles étaient en général plus épais et donc ils étaient exploités en priorité ce qui ne veut pas dire que les autres étaient stériles!
Le minerai de quartz était chargé avec une pelleteuse pneumatique dans les wagonnets poussés à la main vers l'extérieur. A la sortie au jour, un premier tri visuel par deux ouvriers, était effectué. Ils balançaient dans le ravin les morceaux de quartz blanc , a priori stériles pour économiser le broyage...En fait, le soir, c'est en cassant ces blocs dans le ravin que j'ai trouvé mes plus beaux échantillons de wolframite!
Ensuite les wagonnets étaient basculés sur une trémie qui alimentait le concasseur primaire suivi d'un broyeur à barres et à boulets. En sortie, une farine inférieure à 1mm qui était déversée dans une colonne verticale. A la base un ventilateur chassait les particules de quartz plus légère et la wolframite plus dense était concentrée dans un tiroir métallique. Il faut imaginer la poussière autour du séparateur!
La SMMC était une petite société économisant sur tout. Beaucoup de machines avaient été récupérées sur d'anciennes mines et les pannes étaient nombreuses. Vu la poussière fine dégagée par ce traitement et les risques de silicose, l'inspection des mines a fait arrêter l'usine de traitement en imposant un traitement par voie humide. La SMMC a donc remplacé les séparateurs à air par des jigs et tables à secousses beaucoup moins polluantes. Mais quelques années près, le cours du tungstène s'est effondré et la mine s'est arrêtée, laissant pratiquement la moitié des réserves intactes.
J ai du conserver un plan des galeries réalisé à cette époque. J'ai aussi une collection d'échantillons assez complète. J'ai connu également un ancien géologue de la Mine P. Sonendrucker du BRGM qui , pour la première fois ( vers 1960) avait fait une campagne de géochimie en surface pour vérifier l'existence d'extension de la minéralisation, notamment vers l'ouest (Ruisseau des logues). J'avais également observé l'abondance d'arsénopyrite aux extrémités de certains filons. L'apatite (verdâtre en aiguille), la tourmaline vert foncé et la muscovite étaient abondantes dans des poches de greisen.